Facebook est-il toujours un réseau social «phare» pour les jeunes ?
Le journaliste Ellis Hamburger, de The Verge, a posé la question à plusieurs spécialistes des réseaux sociaux et sa conclusion est frappante : “Il semblerait que Facebook n’offre plus vraiment aux ados ce qu’ils cherchent. Avant, c’était cool de s’exhiber sur Facebook avec des photos de soi-même et de ses amis. Maintenant, les jeunes ont l’air de chercher quelque chose de plus intimiste, comme Snapchat. Et Facebook est devenu trop gros pour répondre à cette attente.”
Plus flagrant encore, la présence plus importante des parents de ces jeunes apportent un côté « has been » à ce réseau social, les jeunes se tournent donc vers de nouveaux services comme Instagram ou Snapchat, par exemple.
Les alternatives : l’avènement de Snapchat ou « les photos qui s’autodétruisent »
Lancée en 2011, Snapchat est une application basée sur l’échange de photos qui s’autodétruisent. La promesse : chaque utilisateur peut envoyer des photos à ses contacts qui auront jusqu’à dix secondes maximum (durée déterminée par l’utilisateur au préalable) pour les regarder avant qu’elles ne disparaissent à tout jamais. Ce réseau social, considéré comme « l’eldorado des ados » est de plus en plus en vogue, ainsi l’âge moyen des membres Snapchat est de 18 ans et son utilisation séduit plus de 50 millions d’utilisateurs (source Forbes). Son attractivité : offrir un caractère éphémère et sans conséquences majeures de partage de photos, que les autres réseaux sociaux tels que Facebook, Twitter et Google + ne permettent pas. Ainsi, l’utilisation première de ce service n’est autre que le « sexting », comprendre ici, s’envoyer des photos à caractère intime voir pornographique.
Mais ces photos sont-elles aussitôt vues et aussitôt détruites ? Si Snapchat affirme à ses utilisateurs l’envoi de photos « sans laisser de trace », de récentes affaires prouvent le contraire. Ainsi, un expert de l’entreprise américaine Decipher Forensics a annoncé avoir découvert une faille dans l’application le 8 mai 2013. L’ensemble des photos reçues par un utilisateur est stocké dans un dossier caché récupérable sur le disque dur d’un téléphone équipé du système Android. Quelques manipulations à l’aide d’un logiciel avancé réussissent assez facilement à récupérer toutes les images. Une autre affaire de piratage informatique en date du 31 décembre 2013 témoigne que 4.6 millions de pseudos et numéros de téléphones d’utilisateurs ont « fuité ». Si Snapchat séduit des jeunes avides d’échanges de photos qui ne laissent pas de traces numériques indélébiles, le risque qu’ils laissent une partie de leur vie privée ouverte pour l’éternité sur la Toile est bien toujours là.
Les enjeux de ce réseau social
Les jeunes et la maîtrise de leur vie privée sur internet
Regard de l’expert sur le phénomène de colonisation numérique
Christophe Alcantara, Maître de Conférences en Sciences de l’information et de la Communication, IDETCOM, UT1 Capitole, au sujet de la colonisation numérique :
« Les modèles économiques associés aux GAFA (Google, Amazon, Facebook et Apple) ont une part visible et une part un peu plus cachée. La zone la moins visible concerne la collecte et la valorisation de données personnelles des internautes qui utilisent les écosystèmes proposés par ces sociétés. Derrière une apparente gratuité, les termes de l’échange sont assez asymétriques puisque l’internaute concède gracieusement des informations personnelles sans nécessairement avoir conscience de l’étendue des informations cédées et donc du caractère intrusif des dispositifs utilisés. Il y a donc une véritable colonisation numérique qui s’opère sous nos yeux et la convocation d’un droit à l’oubli numérique est encore assez illusoire pour une multitude de raisons que le format de cet échange ne me permet pas de développer plus longuement. »
Laure Doucet, Nour Hajar